Récit d’une étudiante qui a réussi le DALF C1

Récemment, une de mes chères étudiantes avait préparé une PO pour son cours de français et je l’ai trouvée super. L’exposé était très clair et très bien organisé, agréable à écouter, et Lucy paraissait très à l’aise, comme si elle avait fait cela toute sa vie. Cependant, quand je l’ai connue, elle n’était pas aussi à l’aise que ça. Elle était en pleine préparation du DALF C1 et elle ressentait une pression qu’elle ne ressent plus à présent. Je lui ai donc demandé si elle accepterait d’écrire un texte pour parler de son expérience de l’examen et donner quelques conseils aux futur.e.s candidat.e.s. Malgré son stress, elle l’a réussi avec un très bon score. Et elle continue à perfectionner son français au quotidien. Voici son récit :

Il pleuvait lorsque j’ai quitté le bureau à midi pile pour aller à l’Institut Français. J’avais l’estomac noué et les mots “pourquoi, mais vraiment pourquoi ?” qui tournaient sans cesse dans ma tête. Deux heures plus tard j’étais dans une pièce sombre avec deux autres étudiants et une surveillante qui, sans dire un mot, m’a donné un choix de trois dossiers sur des sujets variés, le stimulus pour la production orale. Le lendemain j’y suis retournée pour un examen de quatre heures et demie. Le soleil brillait ; j’avais toujours l’estomac noué. Pourquoi, mais vraiment pourquoi ?

Trois ans plus tôt j’avais décidé de passer l’examen du DELF B2 – pour me prouver à moi-même, et aux autres, que j’en étais capable. Lors de mes préparations pour passer le DELF B2, je suis tombée amoureuse non seulement de la langue mais également du processus d’apprentissage. J’ai découvert que je pense différemment en français, que j’écris avec un plaisir qui me manque en anglais – même si jusqu’à présent je ne réussis guère à m’exprimer avec l’élégance, la légèreté et la simplicité que je recherche. Lire des romans ou des articles en français me fait plaisir ; écouter des podcasts français ouvre un nouveau monde dans lequel je plonge avec enthousiasme. En apprenant le français, je m’échappe et je me découvre, j’échappe au quotidien et je le découvre.

Cependant, la question se pose toujours : pourquoi passer l’examen du DALF C1 ? En fait, je n’avais aucune raison pour le faire : je n’avais pas besoin d’une attestation ni pour étudier ni pour travailler et il y avait peu de chances que je déménage en France. Donc, pourquoi me soumettais-je à la torture d’un examen qui, tout le monde s’accorde là-dessus, pose un grand défi, même pour ceux qui s’immergent chaque jour dans la langue ? J’ai besoin de défis ? Peut-être. Je suis masochiste ? Sans doute !

Franchement, je ne sais toujours pas pourquoi. Sauf que, pensais-je, peut être que le but de passer un examen exigeant me forcerait à prendre mes études de français au sérieux, à voler un peu de temps au quotidien pour l’étudier.

Étant donné que je n’ai jamais vécu en France, comment me suis-je préparée pour passer – et réussir – l’examen ? Puis, maintenant, comment va la continuation de mes études ? Ce que j’ai appris après avoir réussi le DALF C1, c’est qu’il y a encore beaucoup à apprendre, il y a encore plus à améliorer – et il y a beaucoup de choses que j’oublierais si je ne continuais pas à les pratiquer ! En fait, je dirais que plus j’apprends, plus je me rends compte de tout ce qu’il reste à apprendre !

Tout d’abord, j’ai suivi un cours qui vise à aider les étudiants à préparer cet examen. (Je n’avais pas encore eu la chance de tomber sur le site web de Manon ! Heureusement, je l’ai trouvé juste avant l’examen et j’ai vraiment mis à profit les deux cours durant lesquels j’ai pratiqué la production orale.) Selon moi, il est essentiel d’en suivre un car les quatre épreuves sont très particulières, voire bizarres pour les apprenant·e·s ! De plus, je suis une étudiante qui apprend quelque chose en le pratiquant. Mémoriser du vocabulaire et comprendre les règles de grammaire, sans les utiliser, c’est presque impossible pour moi.

Je veux discuter ici principalement les deux épreuves de production. Pourtant, avant que je ne les aborde, quelques idées sur la compréhension orale et la compréhension écrite : pour réussir ces épreuves il faut sans aucun doute beaucoup écouter et lire. C’est l’une des choses qui m’a beaucoup apporté, au-delà des exigences de l’examen : j’ai lu – et je continue à lire – des articles de science vulgarisée, d’économie, de culture française, de questions variées de société ; j’ai écouté – et je continue à écouter – des podcasts qui traitent de racisme, de féminisme, des grèves, du système de santé, de philosophie, du quotidien, etc. Grâce à mes études de français ma vie est vraiment enrichie.

De surcroit, cela m’a beaucoup aidée pour l’examen : c’est plus facile de répondre aux questions d’un examen si le sujet et le format de l’émission sont familiers. Pourtant, on doit aussi apprendre à comprendre les nuances du texte et à répondre aux questions. Utilisez les ressources en ligne. Même si l’on est très à l’aise avec le français, capable de comprendre globalement tout ce qu’on lit ou qu’on écoute, on doit apprendre ce qui est requis pour l’examen. J’ai fait tous les exercices proposés par TV5 et je pense que cela m’a été vraiment bénéfique.

En outre, la lecture d’articles vous aide également dans les épreuves de production. La production écrite comprend un essai et une synthèse – cette dernière est un exercice à la fois précis, exigeant et, selon moi, satisfaisant. Le contenu étant donné, la synthèse offre la possibilité de pratiquer la manipulation du langage. De plus, en la pratiquant, vous développerez la capacité d’apprécier ce qu’est un argument efficace – quelque chose dont vous avez besoin si vous voulez réussir l’examen du DALF C1.

L’essai argumenté est une discipline particulière : en seulement 250 mots on doit construire un argument clair, concis, écrit avec un vocabulaire sophistiqué et varié et bien structuré avec des connecteurs logiques. (Il faut que les connecteurs soient logiques ! On ne peut pas utiliser n’importe quelle sorte de connecteur !)

D’après moi, la meilleure méthode pour s’entrainer à cette épreuve est …écrire, écrire, écrire toujours plus : pas seulement des essais, mais aussi des plans. Entrainez-vous à écrire trois phrases différentes pour ouvrir un essai ou pour le conclure. Essayez d’écrire des phrases qui lient vos paragraphes (et donc vos points différents). Faites un jeu avec le langage. Mettez en œuvre la grammaire que vous venez d’apprendre. Au moment de l’examen on veut ressentir une certaine aisance à utiliser de nombreuses expressions variées, qui démontrent nos connaissances avancées mais qui conviennent aussi à l’argument (y compris la forme que l’essai prend). J’ai tendance à utiliser le subjonctif lorsque cela rend la phrase trop lourde et peu naturelle, maladroite (même si en théorie l’utilisation est correcte). Je voudrais désormais m’exprimer avec plus de clarté et de simplicité, développer ma compétence à manipuler la langue et faire plus attention au style.

Selon moi, pour la production orale on a besoin d’une structure claire, de points substantiels et exemplifiés et, dans l’idéal, d’un peu de spontanéité – une combinaison tellement exigeante ! De plus, une heure passe vite quand on a plusieurs articles à lire avant que l’on ne puisse commencer à organiser son discours.

Pour préparer une production orale, j’ai besoin d’une structure de base en tête. Je la note sur le papier pendant que je pense au sujet et que je réfléchis aux articles que je viens de lire. Cela me calme et donne également une forme à mes idées. Ce que je voudrais souligner, c’est que cette structure n’est pas rigide. En fait, elle me permet l’inverse : de me détendre, de prendre une respiration profonde, de penser plus clairement – et d’être plus fluide, plus naturelle quand je commence à parler.

L’aspect que j’ai trouvé le plus difficile, c’est la formulation d’une problématique, c’est-à-dire la question que l’on veut aborder. Après avoir éprouvé beaucoup d’anxiété, je me suis rendu compte qu’une question claire et simple qui me permet de traiter le sujet sous plusieurs angles marche bien. En fait, je pense qu’il est plus important de décider d’une question que de trouver la question parfaite. Je l’écris au centre d’une feuille de papier. Ensuite je me concentre sur le développement de mon argument, en utilisant ma structure. J’essaie d’inclure des exemples de ma vie ou de ce que j’ai lu et parfois de citer des articles du dossier. La tentation est de rédiger la production orale entière : essayez d’y résister ! Après tout, ce n’est pas une production écrite. Je crois qu’une partie importante de la production orale est la façon dont on interagit avec nos auditeurs – en les regardant dans les yeux, en souriant (oui, vraiment !), en faisant des gestes, même en hésitant. C’est un jeu. Dans la production écrite il faut jouer le jeu, en écrivant une lettre, un blog, un article. Pour la production orale, c’est la même chose : nous devons prétendre que nous sommes experts sur un sujet et très à l’aise pour en faire une présentation. Même si c’est loin d’être le cas !

Si je préparais l’examen à nouveau, je passerais plus de temps à pratiquer la deuxième partie de l’épreuve orale. Lors de l’examen lui-même, je garderais un peu de temps pour réfléchir aux questions que les examinateurs pourraient me poser.

Comme Manon le sait très bien, il y a un tas de choses sur lesquelles j’ai besoin de me concentrer pour consolider et développer mes connaissances en langue française, y compris des choses assez basiques sur lesquelles j’ai encore des doutes.

Lucy Webster, étudiante de FLE, niveau C1

Merci Lucy !

Changements dans les examens du DELF et du DALF

Samedi dernier, je me baladais dans les rues de Kyoto quand mon téléphone, qui m’espionne constamment et me connait si bien, m’a envoyé une notification pour m’alerter qu’un article était susceptible de m’intéresser : Les épreuves des diplômes DELF et DALF évoluent.

En effet, le titre m’a tout de suite plu. Je ne l’ai pas lu immédiatement car c’était le weekend et j’avais plein de choses à faire et à voir à Kyoto et je ne voulais pas penser au travail. Mais j’ai quand même eu des réflexions qui m’ont très vite traversé la tête. Je me suis dit : “j’espère qu’ils ont changé le format du DALF et que les candidats seront plus évalués sur leurs compétences linguistiques que leurs compétences académiques” ; “peut-être qu’il vont proposer un DALF académique et un DALF général, comme pour le IELTS en anglais, car ça aurait beaucoup de sens de ne pas demander aux candidats ne souhaitant pas s’inscrire en fac de rédiger une synthèse et de faire des présentations orales exigeant 15 minutes de monologue, situation dans laquelle les candidats ne se trouveront probablement jamais s’ils ne comptent pas faire d’études supérieures en langue française” ; “peut-être qu’ils vont proposer une partie similaire à celle intitulée Use of English dans les examens d’anglais, dans laquelle les candidats pourront démontrer qu’ils connaissent la grammaire et ont du vocabulaire”, etc., mais en gros, j’espérais que le format du DALF changerait et serait moins intimidant, moins stressant, moins académique, plus axé sur la linguistique. Je me suis aussi demandé s’il allait falloir que je refasse une formation pour me mettre à jour, aller à Paris, et oh la la la, combien ça allait me couter toute cette histoire !

Un de mes amis a passé le C1 d’anglais l’an dernier et le C1 de français en mars de cette année. Il a été choqué de voir la différence entre les deux. Il a trouvé le C1 d’anglais beaucoup moins intimidant. Il s’en est bien sorti en français, mais jusqu’au dernier moment, il était dans un état de stress incroyable, qu’il n’avait pas ressenti avec le CAE (C1 d’anglais). Et il parle et comprend très bien le français depuis de nombreuses années ! Pour moi, il est évident qu’il faut changer le format du DALF et proposer quelque chose de plus semblable aux examens Advanced et Proficiency en anglais pour que ce soit plus juste. J’avais aperçu la première ligne de l’article qui disait quelque chose à propos des normes européennes. J’avais bon espoir.

Quand j’ai fait une pause pour déjeuner, j’ai lu l’article et j’ai été un peu (beaucoup) déçue. Les changements sont minimes et concernent principalement les niveaux A2, B1 et B2 : il n’y aura plus de questions à réponse ouverte, il y aura plus de questions à choix multiple, il y aura plus d’exercices mais moins de questions par exercice et la CE de B1 passera de 35 à 45 minutes. Et voilà. C’est ce que dit l’article en tout cas et comme il a été publié sur le site du ciep, je suppose que c’est exact.

En ce qui concerne le DALF, il y a un changement. Un seul : il n’y aura plus de domaines de spécialité. Les candidats ne pourront plus choisir entre Lettres et Sciences Humaines et Sciences.

Apparemment, les changements affectant le DELF vont nécessiter une période de transition… de 3 ans. C’est-à-dire que les formats actuels et les nouveaux formats vont coexister pendant 3 ans. C’est une estimation, donc cela pourrait être plus court… ou plus long je suppose. Hmmm.

Pour le DALF, le changement sera effectif dès mars 2020.

Je suis ravie de voir qu’ils essaient de changer le format des examens, mais j’aurais vraiment aimé plus de changement pour le DALF. De vrais changements. Je rêve d’un DALF moins académique pour les candidats ne souhaitant pas faire d’études supérieures en langue française. Qu’il reste tel quel pour celles et ceux qui souhaitent aller en fac, je trouve cela assez utile en fait. Si un·e candidat·e souhaite étudier en français, il ou elle devra maitriser les codes académiques français. Sinon, ses études risquent d’en pâtir. Et il est important d’avoir un niveau de correction linguistique très élevé. Cela va sans dire. Même si j’ai personnellement eu une prof en master qui faisait beaucoup de fautes de français. Elle était étrangère et experte dans son domaine, mais sa maitrise du français n’était pas parfaite du tout ! Parfois, certaines phrases dans ses cours me laissaient perplexe. Mais je m’égare. Ce que j’aimerais voir un jour, c’est un DALF général qui permettrait aux étudiants d’écrire des textes plus en adéquation avec la vie réelle et qui permettrait plus de créativité. Et aussi qui génèrerait beaucoup moins de stress.